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Ducasse 03998

Une vue de la "place Verte" actuellement place du Général de Gaulle,

qui fut créée vers 1880, avec son kiosque, à gauche l'école du Sacré-Coeur,

 la gendarmerie et au fond les petites maisons blanches,

où les rempailleuses de chaises louaient une pièce pour travailler.

Les roulottes des forains annoncent la ducasse.

(photo n° 3998) 

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Une Institution de la Ducasse Halluinoise…

« Madame Jeanne » de Tourcoing.

 

En 1996, dans la presse locale, on pouvait recueillir les propos de Mme Jeannine Bossaert-Dhavelons, 69 ans, industriel forain en confiserie et véritable institution des traditionnelles ducasses d’Halluin qui se déroulent chaque année en juin et septembre. 

Depuis 51 ans au cœur des fêtes foraines de la région, cette figure tourquennoise qu’on retrouve à chaque fête dans la cité, souvent porte-parole des forains, « Madame Jeanne » comme on l’appelle du fait de son enseigne, habite dans le quartier de la gare à Tourcoing.

Dites-nous quelque chose de votre propre histoire ? 

« Naissance à Tourcoing, au Chêne-Houpline, dans une caravane foraine… D’une famille où je représente la quatrième génération d’industriels forains. J’allais à l’école l’hiver au Virolois, mais dès 9 ans j’ai aidé mon père qui avait d’abord une loterie, puis un manège  de chevaux de bois. 

Ce manège là, je l’ai vu d’abord tiré par des chevaux, puis actionné par la vapeur, avant qu’il fonctionne à l’électricité. En même temps ma tante Jeanne tenait un stand de confiserie ; je l’ai aidée, puis je lui ai succédé en gardant son enseigne. Eh oui, cela fait un demi-siècle que je fais dans le nougat… 

Mariée depuis 1969, je continue à exercer ce métier qui me passionne, dans des temps qui deviennent toutefois de plus en plus difficiles… »

 

De votre métier ? 

« Je l’adore. C’est dans le sang vous savez. J’ai d’ailleurs toujours défendu les forains, avec le tempérament qui est le mien. Des maires de Tourcoing, j’en ai connus. Eux aussi ont appris à me connaître ; je n’ai pas peur de dire les choses. 

Ce métier, je l’exerce de la foire d’hiver à Tourcoing (en février) jusqu’en novembre. Avec un petit « revenez-y » à Noël. J’ai toujours été fidèle aux différents rendez-vous des fêtes foraines de la métropole, et je n’ai pas changé. Même si les endroits où cela marche mieux aujourd’hui ne sont plus ceux que je fréquente, malheureusement. 

C’est devenu difficile pour ce métier. Dans le temps, les places des villes n’étaient pas faites pour les automobiles, mais bien pour accueillir fêtes et manèges. Et la foule s’empressait dans nos foires foraines. On ne demande pas la lune. Simplement le droit de travailler tranquillement… ».

 

Des passions que vous avez dans la vie ? 

« Cela va de pair avec mon métier : j’adore parler avec les clients. Le contact, c’est primordial pour moi. Je ne pourrais pas rester enfermée chez moi toute la journée…

 Au fil des années, j’ai fini par être connue, c’est sûr, et à connaître nombre de clients. Dernièrement une cliente me présentait sa fille. J’avais connu sa mère et sa grand-mère auparavant… 

Avec les habitués qui prennent d’ailleurs souvent les mêmes produits, se tissent en quelque sorte des liens. Les gens se confient beaucoup. On suit leur vie de famille, leur parcours personnel, avec ses joies et ses misères.

Et puis, pour beaucoup de Tourquennois, je suis un symbole de leur enfance. En me voyant, il y a forcément des souvenirs qui leur viennent. C’est plutôt sympathique, cela… ».

 

De Tourcoing ? 

« Je suis fière d’être tourquennoise. Tourcoing, c’est ma ville. Je regrette simplement que ce ne soit plus le Tourcoing d’avant. Il y a certaines évolutions qui m’attristent. La vie change, la jeunesse aussi. Mais je n’ai jamais eu envie de vivre ailleurs.

J’en ai vu des retraités quitter Tourcoing, et revenir finalement parce qu’ils ne s’habituaient pas ailleurs. Question de mentalité… ».

 

De votre quartier ?

« Il est dans la mouvance de mon enfance. C’est « mon » quartier, en somme. Et on a de bons rapports avec nos voisins. Cela fait du bien d’avoir un point d’ancrage. Surtout dans notre métier ».

 

De la famille ? 

« C’est beau la famille. Surtout quand on s’entend bien. C’est le cas pour moi. Dans les familles de forains, on est content de se retrouver. On sait aussi fêter comme il se doit les anniversaires ensemble, par exemple… 

Il y a bien des explications de temps en temps, à cause du métier. Mais il n’y a pas de rancune. D’ailleurs personnellement, je ne sais pas bouder bien longtemps. Je dis ce que j’ai sur le cœur, et puis on passe à autre chose… ».

 

De Dieu ? 

«J’ai mes idées  là-dessus, elles sont personnelles. Disons que j’y crois, mais que Dieu n’est pas toujours juste. Il y a des choses qui se passent maintenant et qui ne devraient pas être… ».

 

De l’argent 

« Il ne fait pas toujours le bonheur, mais il y contribue. On doit savoir travailler, ne pas gaspiller, mais il faut en profiter tout de même. J’ai parfois le sentiment que la jeunesse d’aujourd’hui ne se rend pas compte de ces réalités. On le voit quand les enfants pinaillent pour choisir telle ou telle friandise. Il me semble que les parents n’ont plus d’autorité. C’est de là que viennent beaucoup de problèmes… ».

 

De l’amitié ? 

« C’est parfois plus fort que l’amour. Des vrais amis, il n’y en a pas beaucoup. L’amour  peut passer, mais l’amitié reste ».

 

De l’amour ? 

« C’est la grande histoire de la vie de chacun. Il faut surtout bien s’entendre, pour former un couple dans la durée. Mon mari et moi on est tous les deux des nerveux. Parfois ? ça fait tilt, forcément. Mais c’est surtout pour les autres qu’on s’accroche… Quand il s’agit d’aider quelqu’un, par exemple, on n’a pas toujours les mêmes idées. Mais la vie continue après… ».

 

De l’an 2000 ? 

« On se demande bien sûr comment ça va aller… On y va de toute façon… Il y aura du changement, c’est sûr. On espère juste que ce sera davantage en bien qu’en mal ».

 

Des jeux olympiques ? 

« C’est beau à voir cette jeunesse en pleine santé. Et les médailles françaises qui pleuvent font toujours plaisir. Cela me rappelle les temps héroïques des Enfants de Neptune qui glanaient médailles et succès au water-polo. Les Tourquennois étaient fiers de leur équipe… ».

 

« Enfin dites-nous quelque chose qu’il vous tiendrait à cœur de dire… 

« Je voudrais que les Tourquennois n’oublient pas qu’il y a encore une foire foraine dans leur ville. Je voudrais qu’elle ne meure pas, comme cela a été le cas à Roubaix. Si on avait simplement la visite d’un quart des Tourquennois, ce serait magnifique… ». 

 

« Nougat Jeanne » et la ducasse d’Halluin.

 

En Novembre 2000, voici les impressions des anciens propriétaires du manège des chevaux de bois « Davelons », l’attraction la plus connue dans les années 1950-60-70, et la plus fréquentée par les enfants et parfois aussi par des adultes.

Depuis plusieurs années, il a cessé ses fonctions dans notre région pour se retrouver à Bagatelle (Pas-de-Calais).

 

 Il y avait Jeannine, la joyeuse septuagénaire qui, avec son mari, Jean-Pierre, tient le stand « Nougat Jeanne ». Et puis Christine, qui règne sur le manège des canards, qui a déjà enchanté notre enfance… Et Brigitte, sa sœur, qui nous régale de délicieux croustillons hollandais. 

« On aime bien Halluin, dit Christine. Les riverains sont nos amis. Nous sommes contentes de les retrouver deux fois par an, de prendre de leurs nouvelles ».

 L’histoire d’amour avec notre ville remonte souvent à plusieurs générations. « Vous rappelez-vous le manège des chevaux de bois ? dit Jeanine.

« Il appartenait à mon grand-père. Mon père lui a succédé. A l’époque, il voyait des gens en sabots, à la ducasse. Nougat Jeanne a été créé par ma tante, en 1934. Puis en 1938, ma mère l’a repris ».

 

Le manège des petits canards a été créé en 1920, par le grand-père de Christine et Brigitte. Au départ, c’étaient des bateaux. (En 2010, ils sont toujours au même endroit, face à la mairie actuelle, à côté de la fontaine). 

 Depuis longtemps, l’attraction est devenue une institution halluinoise. Christine montre fièrement les photos de la réception en mairie qui, en 1996, fêtait le cinquantième anniversaire du manège.

« Je me souviens encore de l’époque où la mairie n’était pas encore la mairie ; c’était Chez Mme Sion. Maman y était invitée régulièrement à boire le café ! » 

Quant aux croustillons hollandais, c’est depuis cinq générations qu’on les confectionne ! 

Leur travail n’est pas toujours facile. Il y a des périodes creuses, l’hiver, pendant lesquelles l’argent ne rentre pas. Des enfances passées en pension. La guerre, pendant laquelle il n’a pas été possible de travailler. Jamais de vacances, car les périodes d’arrêt sont consacrées à l’entretien du matériel. Des deuils. Des accidents.

« Mais vous ne parlez-pas de ce qui est triste ? N’est-ce-pas ? » Pas question pourtant d’envisager une autre vie. « J’adore mon métier ! s’exclame Jeanine. J’aurais bientôt 74 ans, et je n’ai pas envie d’arrêter. Voir des gens, cette ambiance de fête… Je suis née là-dedans ! »

Les visages rayonnants des badauds. Les yeux brillants de convoitise devant une belle pomme vernie de rouge. Le rire frais d’un enfant qui décroche le pompon… Les forains sont des marchands de rêve. 

Et puis ils ne se sentent jamais seuls. « Regardez les petites autos, juste en face, souffle Jeanine. C’est ma sœur et mon beau-frère… ». Mais outre les liens du sang, il y a aussi l’immense solidarité des collègues. 

« Si quelqu’un tombe en panne ou est victime d’une tempête, comme cela arrive parfois sur la côte, dit Christine, les autres arrivent pour l’aider à remettre en marche. La machine, c’est le gagne-pain ».

Les forains sont une grande famille.

A la Ducasse d’Halluin… 68 ans parmi les manèges !

 

Deux fois par an, les manèges reviennent sur la place d’Halluin. Ils ont enchanté des générations d’enfants et employé des générations de forains. Arlette Dailly, foraine, nous raconte ses souvenirs en ce mois de Mai 2008. 

« Je suis née dans une roulotte comme les bohémiens », plaisante Arlette Dailly. Mais quand on y réfléchit bien, à cette époque, nombre de femmes accouchaient encore à domicile. Quoi de plus normal alors que d’accoucher dans la caravane qui servait de logement pendant la plus grande partie de l’année ? 

En 1940, elle était donc déjà à la ducasse d’Halluin, lovée dans son berceau, bercée par la musique du manège de chevaux de bois tenue par son père. « Nous sommes déjà quatre générations de forains, proclame-t-elle fièrement. Avant moi, il y a eu ma grand-mère, puis mon père. Maintenant j’ai passé le relais à ma fille, mais je supervise encore avec mon mari ».

 

Dans la famille d’Arlette, il y a aussi sa sœur Jeanne, célèbre pour son nougat. A 80 ans, elle a fini par prendre sa retraite, mais l’enseigne Nougat Jeanne est toujours présente. « C’est une cousine qui a repris » précise Arlette. Car dans la famille, on a le sens de la fidélité à la cause des ducasses. « Nous avons même eu une médaille ici à Halluin, pour l’ancienneté », se remémore-t-elle.

Naturellement les choses ont beaucoup changé. « Halluin, c’était vraiment une bonne ducasse. Elle occupait la rue Marthe Nollet en plus de la place. Et elle était très fréquentée. Je l’aime toujours car l’ambiance y est bonne, même si le chiffre d’affaires a baissé, comme partout ailleurs », affirme Arlette. 

Après le montage des manèges, une pause rassemble les anciens, forains depuis plusieurs générations pour la majorité. Ils évoquent les chevaux de bois, les barques et les poules. Des manèges qui ont disparu au profit d’autres plus modernes.  

 

« Maintenant, il y a aussi beaucoup de jeux d’argent, d’adresse et de hasard. Ca marche très fort », constate Arlette. Mais une chose est sûre, pour les plus jeunes, rien ne vaut un manège du genre di sien, avec ses véhicules colorés et son pompon à décrocher.

Arlette va aider sa fille à l’astiquer pour qu’il soit étincelant : la ducasse doit être un lieu féerique qui donne envie de s’y attarder. Elle peste contre ceux de ses collègues qui n’en font pas assez à son goût dans ce domaine. 

L’autre facteur de la fréquentation, c’est la météo. « Il faut qu’il fasse beau, sinon les gens ne sortent pas, mais pas trop non plus sinon ils partent à la mer », a depuis longtemps constaté cette ancienne parmi les forains.

 

Voir aussi... cliquez ci-dessous :  

Ducasse - "Nougat Jeanne"... Souvenirs Famille Bossaert (Oct. 2020).

Ducasse Manège des Chevaux de Bois « Dhavelons » en 1923 et 1950… (Oct. 2020).

 

 26/9/2010 - 20/10/2020

Commentaire et Photo :  ARPH - Presse - Daniel Delafosse