Récit du Journal "Nord Eclair" du 30 Juillet 2010.
Une vue de l'impasse du Mamelon Vert - rue Jean Jaurès - 1963.
Le linge est étendu entre les habitations.
(photo n° 4100)
L’Impasse du Mamelon vert…
La fin d’une courée.
Héritage de l'époque industrielle, l'impasse du Mamelon Vert, en référence à une bataille de Napoléon III, va disparaître en partie pour donner de l'air au quartier. Sur la vingtaine de maisons vouées à la démolition, quatre sont encore habitées. La fin d'une histoire.
Julie, 9 ans, et son grand frère Florian, 11 ans, sont bien décidés à faire de la résistance. À les entendre, la communauté urbaine devra se lever de bonne heure pour raser leur terrain de jeux favori. « On aimerait avoir un petit parc à la place pour jouer avec nos copains ! » Des générations entières ont joué au milieu de la courée du Mamelon Vert.
Un peu à l'image de Christophe Beckaert, 37 ans, qui a grandi au n°18. « C'était fabuleux, je me suis fait tous mes amis ici. L'ambiance était vraiment celle des courées d'autrefois. On vivait dans la simplicité mais c'était très chaleureux. » C'est sans doute ce qui l'a poussé à revenir il y a une dizaine d'années : « Nous avons quitté un appartement en location quand l'opportunité d'acheter cette maison s'est présentée. »
La famille Beckaert a restauré de fond en comble le n°4. Par chance, le côté pair n'est pas concerné par les démolitions. « Ça fait un pincement de voir nos voisins d'en face partir les uns après les autres mais les décisions sont prises sans nous... On aimerait juste avoir un petit espace devant nos maisons pour que nos enfants puissent continuer à jouer en toute sécurité. Ces maisons n'ont pas de jardin. »
À la demande de la ville, la Communauté urbaine a fait valoir son droit de préemption sur 24 maisons de l'impasse du Mamelon Vert et de sa voisine l'impasse Inkermann, situées au bout de la rue Jean-Jaurès. Des habitations pour la plupart devenues insalubres dans cette courée où les WC communs témoignent encore d'un autre temps. « Il s'agit de dé-densifier ce secteur et de créer du stationnement dans le cadre de la politique Ville renouvelée. Nous sommes sur une démarche similaire à celle réalisée pour la Cité Louise de Bettignies », explique la ville.
Difficile de racheter vu les prix dans le secteur
Côté impair, si la plupart des habitants ont déserté les lieux, quatre familles doivent encore être relogées. Les dernières procédures de rachat par la LMCU sont en cours. Au n°3, Arthur Da Costa attend un compromis. Il a acheté sa maison en 2005 et ne cache pas son amertume : « On aurait dû me dire qu'elle faisait l'objet d'une préemption. Je pensais m'installer ici pour une dizaine d'années. Je suis à deux ans de la retraite, je ne sais pas si je vais retrouver une maison avec l'argent que je vais recevoir. Les prix ont sérieusement grimpé à Halluin. Je partirai peut-être en location. Je n'en veux à personne mais c'est loin d'être évident comme situation. »
Plus loin, la famille Yahdih a retrouvé une maison à restaurer à Halluin où les huit enfants ont grandi. « Quand on a appris la décision de la mairie, on ne voulait pas y croire. Mais il a fallu se faire à l'idée. On vivait en communauté ici. Aujourd'hui, toutes les familles sont éparpillées », confie l'une des filles. Les démolitions ne sont pas annoncées avant l'année prochaine. Ce qui laisse un peu de répit.
Des maisons construites entre 1858 et 1860.
Les maisons de l'impasse du Mamelon Vert ont été construites entre 1858 et 1860. Elles ne possèdent pas de jardin.
Des WC communs sont accolés au mur de l'usine Duriez, au fond de l'impasse (toujours visibles). L'eau de pluie est recueillie dans des tonneaux et les eaux résiduelles s'écoulent dans le caniveau. L'impasse est alors toujours en terre.
Pour la plupart, les maisons du Mamelon vert-Inkermann étaient des maisons de tisserands comme en témoignent les fenêtres situées à hauteur du pavé. Elles s'ouvraient sur les caves et apportaient la lumière indispensable à l'ouvrage sur les métiers à tisser.
Année après année, les maisons ont été sensiblement modifiées, dotées d'un étage pour la plupart, ce qui n'était pas le cas il y a presque cinq décennies. L'impasse a été asphaltée et des chaises et des tables ont été sorties pour se retrouver.
NE.15/08/2009.BD8870
6/8/2010.
Daniel Delafosse
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