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JM 0018

Ets Sion, tissage, 16 rue Pasteur Halluin,
 dans les années 30 :  Bobineuses.
(photo jm 018)
Les anciens tissages halluinois Defretin, Demeestère et Sion  font place désormais à un important ensemble immobilier. C’est l’histoire de ces trois grandes usines textiles, qui ont marqué la vie industrielle locale, durant plusieurs décennies, que vous pouvez découvrir ou vous souvenir grâce aux archives de l’Association Halluinoise « A la recherche du passé d’Halluin ». 

 

Le Tissage Sion à Halluin…

 Historique 1867 – 1979.

 

Aussi, en cette année 2011, il y a exactement 32 ans, le tissage Sion fermait définitivement ses portes en 1979. Cette usine de tissage, à l’époque située rue Pasteur, était également l’une des plus importantes d’Halluin.

 

Voici l’historique de cette industrie halluinoise racontée dans l’ouvrage « Halluin, Images d’Autrefois » Tomes 1 et 2, édités par l’association « A la recherche du passé d’Halluin ».

 
Communément appelé « Usine Sion » par les halluinois, cet important tissage de draperie a employé, pendant près d’un siècle, 1.500 ouvriers et employés : hommes, femmes et enfants.

 

L’origine de cette entreprise est tourquennoise. En 1867, M. Sion crée une usine de tissage de coton. L’usine d’Halluin a vu le jour en plusieurs étapes. C’est vers 1885 que Paul Sion décide fonder la Société Sion Frères à Halluin.

 

Dirigé par Paul et Jules Sion et encadré par le personnel venant de l’usine de Tourcoing, ce tissage fabrique de la doublure et de la draperie simple. Il s’installe rue de la Procession (actuelle rue Pasteur), les bâtiments longent la route de Neuville et le jardin public.

 

Monsieur Paul Sion est également secondé par ses fils Robert et Gabriel et plus tard par ses petits-fils. Un important personnel  d’encadrement assure la bonne marche du tissage : directeurs, contremaîtres, contredames, chefs d’atelier, la plupart issus de l’entreprise.

 

En effet on entre à l’usine à 13 ans, mais assez souvent à 12 ans. On y commence comme apprenti. Grâce à la compétence et à la formation prodiguées par les anciens, et à quelques cours du soir pour certains, on apprend peu à peu le métier choisi et on accède aux responsabilités d’un atelier : la forge, l’entretien, l’apprêt, la teinturerie, la conception des nouveautés… On y reste habituellement jusqu’à la retraite. Comme dans beaucoup d’entreprises de cette époque, des familles entières s’y succèdent : père, mère, frères et sœurs, cousins…    

 

Un deuxième tissage, ajouté vers 1907, fabrique les mêmes articles, auxquels s’ajoute le tissu en serge. Peu après 1907, un troisième tissage appelé « Maroc » et une retorderie se lancent dans la draperie fantaisie, en plus des productions classiques de l’usine.

 

Vers 1912, l’apprêt des tissus de doublure nécessite beaucoup d’eau. On creuse un  forage de 225 mètres de profondeur, qui assure un débit de 60 m3 à l’heure ! (De plus, ce forage alimente la ville en eau).

 

Plus de 5.000 broches de retorderie, des bobinoirs, des grands ateliers d’ourdissage et de canetage, alimentent 800 métiers à tisser. Epluchage, piqûrage et finition terminent cette fabrication de draperies de grande qualité.

 

Mais la première guerre mondiale arrête pendant quatre ans toute cette activité. En trois mois d’occupation la plus grande partie des machines est détruite. En 1918, la teinturerie, l’apprêt, le retordage et tout le tissage sont hors d’usage.

 

Grâce aux dommages de guerre et à l’aide du gouvernement, 250 métiers à tisser fonctionnent le 1er septembre 1919. En juin 1920, 800 métiers sont en action. La teinturerie, l’apprêt et le tissage travaillent normalement. Les entrepreneurs et le personnel réembauché ont fourni un effort intensif.

 

En 1935, la production atteint son plus haut niveau avec 1.125 personnes. Les fabrications sont variées : draperies de laine, tissus de robe, de manteau, des doublures. Dans un grand atelier appelé « Le Maroc »,  on tisse uniquement les doublures en rayonne.

 

L’apprêt et la teinture avaient subi le rythme des agrandissements. Un magasin de « vente sur place » est ouvert à la population locale. On y trouve les nouveautés et comme à cette époque, il y a beaucoup de tailleurs et de couturières, on se fait confectionner ses vêtements sur mesure.

 

Entre 1950 et 1960, un atelier de maille appelé « Texma » s’ouvre avec des machines ultra-modernes. Les premiers métiers automatiques sont également remplacés par des métiers plus performants.

 

L’usine Sion, dont le siège social est à Roubaix, emploie, sur la totalité de son effectif, 500 frontaliers et le personnel féminin représente plus de 50 %. La surface couverte  de l’entreprise est de 30 000 m2 !...

 

Peu à peu des changements dans les fabrications et la modernisation réduisent le personnel. Beaucoup de belges quittent l’entreprise. Ceux qui partent en retraite ne sont plus remplacés. En 1960, on compte plus de 50 médaillés qui ont 30, 40 ans et plus, d’années de présence.

 

Les plus anciens reçoivent en cadeau : une montre en or pour les hommes, une horloge sous globe pour les femmes (on peut encore en admirer certaines sur la cheminée des anciennes retraitées de chez Sion). Parmi eux, Henri Delannoy qui travailla plus de 60 ans fut honoré, à ce titre, de la médaille de l’Ordre National du Mérite.

 

 Pendant toute cette période les grands conflits n'ont pas manqué pour que le savoir-faire de chacun soit reconnu à sa juste valeur, et permettre de mieux vivre. Les anciens s'en souviennent comme d'une époque de grande intensité de lutte sociale : 

En 1967, l'usine Sion fête son centenaire.

Avec la disparition des usines Lorthiois, Defretin, Sion, l'industrie textile halluinoise périclite.

En 1970, c'est la fusion avec la Société Leclercq-Dupire sous l'appellation "Soparlaine". Une partie du matériel est transférée à l'usine de Wattrelos, une autre est vendue comme matériel d'occasion.

En 1972, seul  reste le département "maille" qui est ensuite transféré aux Ets PENICAUD dans l'Aisne. Certains membres du personnel ont suivi, pour d'autres ce fut une période difficile.

C'était la fin d'un long compagnonnage pour une grande partie de la population qui remplissait aux heures de pointe toutes les rues de la ville. Les gens marchaient d'un pas toujours rapide, sachant que la soupe était déjà versée pour ne pas perdre de temps au repas de midi. Matin, midi et soir, on était à l'écoute d'un sifflet dont les multiples appels n'échappaient à personne.

Le sifflet, cette fois, se taisait définitivement. Une grande entreprise halluinoise fermait ses portes en 1979.

 

8/2/2011.

Commentaire : Daniel Delafosse